Différentes manières de travailler en lecture…

Je suis profondément convaincue que la mission suprême de l’école primaire doit être l’enseignement de la langue française et notamment de tout ce qui touche à la lecture, de près ou de loin.

Cette année, et les précédentes, j’ai testé plusieurs façons de travailler dans ce domaine. Je vais essayer d’expliquer ici, l’intérêt et la mise en œuvre de chacune d’elles. Les termes que je reprends ici, sont peut-être détournés du sens qu’ils ont pour d’autres, ici ou là, au Québec, en Belgique ou en France. J’ai pioché au hasard, des termes qui me convenaient !

* La lecture partagée

Autrement appelée lecture suivie ou littérature, la lecture partagée est la façon dont nous désignons, dans ma classe, la lecture d’œuvres communes à tous. Pendant quelques années, je me suis contentée de séances peu intéressantes : lecture silencieuse, lecture orale puis questionnaires (beurk). J’ai changé à mon plus grand bonheur, pour des séances plus libres, centrées sur l’interprétation de l’œuvre. (Voir ici par exemple sur Une histoire à quatre voix).

Intérets :

– lieu d’apprentissage spécifique : comment interpréter un texte
– lieu d’échange de points de vue et de débats entre les élèves
– lieu de réflexion intense (on voit véritablement les idées des enfants se complexifier tout au long de la séance)
– lieu de réinvestissement des connaissances en lecture/littérature
– lieu d’acculturation (connaissance des auteurs, mise en réseau d’œuvres, etc.)

Mise en œuvre :

– une œuvre entière par période (les élèves disposant des livres)
– j’essaie de ne pas dépasser trois semaines sur une œuvre pour que les élèves ne se lassent pas
– le déroulement des séances doit être spécifique à chaque ouvrage, si on veut l’exploiter à sa juste valeur
– dans tous les cas, il faut le plus possible, favoriser les échanges entre les élèves, les retours en arrière pour vérifier son interprétation, les argumentaires de chacun, l’écoute… Et pour cela, il faut soi-même… la mettre en veilleuse ! 
– créneaux longs : 45mn, 1h.

* La lecture guidée

La lecture guidée est ce que j’appelais auparavant (et peut-être vous également), la lecture compréhension. Il s’agit de s’entraîner à utiliser des stratégies de compréhension. Cette année, je l’ai essentiellement travaillée grâce aux mini-leçons et exercices Je lis, je comprends.

Intérets :

– lieu d’apprentissages spécifiques : comment comprendre un texte
– lieu d’entraînement : on travaille collectivement au crayon à papier, sans aucune pression
– lieu de discussions sur les stratégies employées par chacun, celles qui fonctionnent ou non, les progrès qu’elles permettent 
– lieu de méta-cognition 

Mise en œuvre :

– une à deux fois par semaine, des exercices spécifiques à certaines compétences, grâce au fichier de travail Je lis, je comprends. Les élèves travaillent collectivement (sauf lors d’évaluations…)
– une à deux fois par semaine, des mini-leçons concernant les stratégies de lecture à proprement parler mais aussi, le fonctionnement des temps de lecture autonome. Les mini-leçons, comme leur nom l’indique, doivent être courtes et à mon avis sans trace écrite (en tous cas, sans copie). La mini-leçon donne souvent lieu à un affichage (voir ici) 
– créneaux courts : 30 mn maximum pour les exercices écrits et 10 mn pour les mini-leçons
– ce moment doit rester agréable et ludique 

* La lecture autonome

La lecture autonome permet aux élèves de lire le livre de leur choix.  

Intérets :

– lieu d’apprentissage spécifique : comment devenir un lecteur
– lieu d’épanouissement personnel (chacun lit en fonction de ses intérêts, projets, capacités…)
– lieu de liberté (c’est pas tous les jours qu’on donne aux enfants la possibilité de faire leur choix !)
– lieu d’échange (les élèves peuvent suggérer des lectures à leur camarades, des achats à l’enseignant…)
– lieu d’entraînement aux stratégies de compréhension et aussi à l’autonomie d’un vrai lecteur (choix du livre, progression dans celui-ci, tenue d’un recueil des traces laissées par ses lectures) 
– moment et atmosphère propices à l’évaluation sous forme de passations individuelles 

Mise en œuvre :

– les élèves disposent de boîtes de livres qu’ils peuvent remplir tout au long de la journée (pour éviter que ce soit pendant le moment consacré à la lecture)
– ce moment a lieu après une mini-leçon et est suivi d’un bilan. La mini-leçon se termine souvent par une mission à effectuer pendant le temps de lecture (par exemple : chercher des connecteurs, faire des connexions…) et le bilan permet de revenir sur cette mission
– après le bilan, les élèves remplissent divers documents dans leur cahier de lecteur (voir ici), pour garder une trace de leur lecture et poursuivre des objectifs personnels

* La lecture autonome : rallye-lecture

Les élèves lisent ici aussi seuls, mais des livres ayant été sélectionnés par l’enseignant. Après avoir lu un ouvrage, ils remplissent un questionnaire bref, afin de vériier leur compréhension. Ce questionnaire est noté sur dix points, les élèves cherchent à obtenir le plus grand nombre de points et peuvent observer leurs résultats sur un tableau. (Mon rallye-lecture est ici). 

Intérets :

– lieu d’entraînement sur les stratégies de compréhension
– lieu d’auto-évaluation
– lieu d’émulation et d’échange (les livres étant lus par plusieurs élèves)
– lieu d’acculturation (travail sur un thème, mise en réseau…)

Mise en œuvre :

– dans l’idéal, un rallye par période, de difficulté croissante et offrant une certaine variété (types d’ouvrage, thèmes, auteurs…) 
– à chaque fin de période, remise « sacralisée » d’un diplôme
– au sein de chaque rallye, des ouvrages de niveaux différents 

* La lecture à deux

Les élèves lisent ensemble. Mon article à ce sujet est ici.  

Intérets :

– lieu d’entraînement sur les stratégies de compréhension
– lieu de plaisir et d’échange
– lieu d’entraînement à la lecture orale
– lieu d’évaluation entre pairs 

Mise en œuvre :

– lors des créneaux de littérature autonome, un groupe s’installe en fond de classe, pour lire à deux. Ils respectent un ordre de passage établi à l’avance (plus d’explications dans l’article précité)
– différentes façons de lire à deux (voir chez Zazou)

 * La lecture magistrale

L’enseignant lit aux élèves qui n’ont pas le texte sous les yeux. Je lis cette année, tous les jours un épisode du Feuilleton d’Hermès.

Intérets :

– lieu d’acculturation (en l’occurence : la mythologie)
– lieu d’entraînement à la compréhension « pure » c’est-à-dire débarrassée des contraintes de déchiffrage
– lieu de débat interprétatif
– lieu d’évaluation individuelle de la compétence reformuler une histoire entendue

Mise en œuvre :

– séance quotidienne de 20 mn
– lecture par l’enseignant puis, reformulation par un élève, débat interprétatif ou réflexion sur les symboles, la psychologie des personnages, les connexions avec d’autres textes…
– bref questionnaire de compréhension (ici) 

* La lecture à la maison

Les élèves ont à lire un bref roman (chez moi ceux issus des Bibliobus Préhistoire et Antiquité) pendant les vacances scolaires. Ils sont évalués sur cette lecture, de façons différentes.

Intérets :

– lieu d’acculturation (en l’occurence : l’histoire)
– lieu d’entraînement à la compréhension
– lieu de liens entre parents et enfants, entre l’école et la maison
– lieu d’évaluation individuelle de la compétence répondre à des questions sur un texte
– permet à l’élève de garder ses habitudes de lecture quotidienne pendant les vacances scolaires… 

Mise en œuvre :

– un petit roman à lire à chaque vacances scolaires
– diverses évaluations de difficulté croissante :
1. fiche de lecture à réaliser pendant la lecture
2. questionnaire à remplir au cours de la lecture
3. questionnaire à remplir en classe à la rentrée
4. évaluation du type « raconte l’histoire » (très dur en CE2) 

Tout ceci prend un certain temps, mais ça en vaut la peine !